C’est avec Catherine Atlani que j’ai commencé la danse. Elle m’a quasiment tout appris en compagnie de Dominique Boivin et Gisèle Gréau. J’étais un élève des Beaux-Arts très éloigné du mouvement, quoi que je dessinais des corps en mouvements. Après une année de cours assidus avec les Ballets de la Cité — on parle là de 1978 — Catherine, à ma grande surprise, me propose deux années de formation intensive pour faire de moi un danseur curieux, attentif, passionné, fougueux, énergique, généreux, emballé par la moindre des propositions en improvisation. Ce qu’elle réussit à merveille, me semble-t-il. Je me transformais chaque jour comme le papillon dans sa chrysalide, chaque fois un peu plus concentré, un peu plus solide sur mes jambes. Chaque fois plus inventif. Catherine nous laissait écrire des modules chorégraphiques à l’intérieur même de ses chorégraphies. Elle nous missionnait, Brigitte Hébert, Nathalie Cagneux et moi, dans les écoles multiples de Seine-Maritime. Nous allions par monts et par vaux, enseigner la danse à des enfants, alors que nous tenions à peine debout. cette formation sur le terrain, au cœur même de l’humain me boulversa, et me bouleverse encore. Elle avait une confiance infinie, nous avait choisis et nous étions autonome dans cette formation
Je repense souvent à ces deux années passées, qui m’ont mis les pieds à l’étrier. Catherine avait l’art de responsabiliser les gens. Sachant être présente au bon moment, avoir les mots justes, elle savait aussi nous laisser se dépatouiller seuls avec nos problème. Une autogestion dynamique, énergique et enthousiasmante. Suite à ces deux ans d’une intensité remarquable, Catherine décida qu’il était temps pour moi de monter à la capitale. Elle ne m’abandonnait pas, elle me propulsait parce qu’elle savait que le petit rouennais déguingandé que j’étais allais tracer un chemin dans la danse. C’est donc avec une grande émotion, à fleur de peau, que je pense à cette grande dame.
Claude Brumachon
Catherine Atlani, pionnière de la danse contemporaine et féministe à la marge des « années mouvements » est une figure incontournable de la danse contemporaine française.
Aux questions posées par Christian Aubry :
– Vous êtes une rebelle ?
– Non, mais fondamentalement libre, oui ! On dit parfois que je fais des spectacles « provocants », c’est faux ! Ou s’ils le sont, c’est par rapport à une norme « officielle » parce que j’utilise un autre corps et que je m’intéresse à la profondeur de l’être…
– Que ferez-vous quand vous serez morte ?
– A priori je ne danserai plus.
Catherine Atlani nous a quittés le 17 septembre 2023 à Saint-Sauveur en Puisaye, la ville de naissance de l’écrivaine Colette. Après une formation chez Irène Popard, elle poursuit ses études aux États-Unis. Début des années 70 elle fonde « les Ballets de la cité », s’installe en Normandie et ouvre un lieu phare à Rouen, le moulin de Darnétal. Plusieurs danseuses et danseurs feront partie de sa compagnie : Odile Azagury, Gisèle Gréau, Jean-Claude Ramseyer, Anne-Marie Reynaud, Quentin Rouiller, Geneviève Sorin, Dominique Bagouet, François Raffinot, Dominique Boivin, Claude Brumachon…
Au milieu des années 80, elle fonde le Café de la Danse à Paris, rue de Lappe.
Cette soirée lui sera entièrement consacrée avec des extraits de films-archives présentés par le CND, des invités (Gisèle Gréau, Claude Brumachon & Benjamin Lamarche, Dominique Boivin, Odile Azagury, Isabelle Maurel…), ainsi qu’un film d’Hugo Bertin dédié à sa grand-mère Catherine Atlani…
Sa fille Elise Vigier actrice et metteuse en scène également présente pour cette soirée exceptionnelle viendra témoigner du parcours riche et engagé de Catherine Atlani danseuse et chorégraphe.
Tout comme Trisha Brown ou Carolyn Carlson, Catherine Atlani dessinait sa danse. Le théâtre de l’Arsenal présentera ses dessins à l’encre de Chine à partir du mois de janvier 25.
Dominique Boivin
Représentation(s)
Hommage à Catherine AtlaniInterprètes actuels